En préparant un article qui présentait une scène du film Chocolat, j’ai regardé deux extraits – une « série de plans » et un « montage ». Ils sont tous les deux excellents et offrent de bons exemples à retenir pour les scénaristes.
“Chocolat”, scénario de Robert Nelson Jacobs, d’après Joanne Harris
Tout d’abord, juste pour être clair : il n’y a pas de définition arrêtée pour ce qu’on appelle « montage » ou « séries de plans » dans les scénarios.
Le « montage » est utilisé pour condenser le temps à des fins narratives, pour faire avancer l’histoire sans dialogue d’exposition.
Le terme a une origine historique spécifique. En fait, dans les années 30 et 40, les réalisateurs confiaient parfois le travail à un spécialiste du montage. Par exemple, le futur réalisateur Don Siegel a travaillé au département de montage de Warner Bros. et a été responsable de dizaines de montages dont celui-ci dans Casablanca, dont vous pouvez voir une partie ICI.
Au fil du temps, le sens du mot a évolué et, par conséquent, « Montage » ou « Série de plans » qu’on voit utilisés dans les scénarios sont parfois interchangeables. Mais on peut faire une petite différence. Voici mes définitions :
– Montage : Série d’images individuelles qui raconte une mini-histoire couvrant une période de temps longue.
– Série de plans : Série d’images individuelles qui raconte une mini-histoire couvrant une période de temps courte.
Chocolat offre les deux. Voici un « Montage » dans lequel Vianne installe sa chocolaterie.
Voici une « série de plans » dans lesquels Vianne se prépare pour une fête.
Le plus important à retenir est le suivant : les deux racontent une histoire. Une mini-histoire, mais toujours avec un début, un milieu et une fin.
Le début montre les préparatifs.
Le Milieu concerne les progrès qui sont faits.
La fin est la finalisation de la tâche.
Il y a donc une chronologie de base qui avance. Mais les deux sont bien plus que cela. Dans chaque mini-histoire, il y a un élément de tension, voire de conflit.
Dans le Montage, les habitants expriment leur curiosité à l’égard du magasin de Vianne, certains méprisent cette influence perturbatrice dans leur petit village, notamment le Comte de Reynaud (Alfred Molina), le maire de la ville, contrarié par l’ouverture du magasin pendant le carême, période d’abstinence. Le Montage se termine symboliquement lorsque la pieuse Caroline (Carrie-Anne Moss) se fait frapper par une roue lancée quand des garçons du coin se laissent distraire par la délicieuse vitrine de la boutique.
Dans la série de plans, le milieu de la mini-histoire montre Reynaud qui détruit d’abord les chocolats dans la vitrine, puis cède à la » séduction » des bonbons, métaphore de ses désirs sexuels refoulés pour Vianne.
Un troisième point important : Les images individuelles de la préparation des aliments sont visuellement attrayantes et l’effet cumulatif immerge le spectateur dans la merveilleuse culture de la cuisine fine.
Aussi, notre défi n’est pas seulement de raconter une mini-histoire… pas seulement de nourrir la signification psychologique de la mini-histoire… et pas seulement de divertir avec chaque plan et l’ensemble des images… nous devons utiliser un langage imprégné de visuel et d’émotion.
Comme le démontrent ces deux exemples dans Chocolat, le « montage » ou la « série de plans » peuvent être des dispositifs narratifs merveilleusement efficaces. Mais ils placent aussi la barre très haut.
Nous devons nous poser la question : est-ce que cette série de plans ou ce montage que j’envisage atteint un niveau de sens et de divertissement proche de celui du film Chocolat ? Sinon, nous devons retravailler le choix des images, l’arc du mini-récit et l’utilisation de la dynamique psychologique en jeu dans notre mini histoire.
Et vous, quels sont vos exemples de films préférés avec des séries de plans et des montages?
© Scott Myers – Article traduit par un.e scénariste membre de La Guilde française des scénaristes.